Les personnes âgées de 60 ans et plus sont au nombre de 18 millions aujourd’hui.

Selon les projections de l’Insee, elles seront 20 millions en 2030 et près de 24 millions en 2060. Le nombre des plus de 85 ans passera de 1,4 million aujourd’hui à 5 millions en 2060. La majorité des personnes âgées vieillissent dans de bonnes conditions d’autonomie.

Seuls 8% des plus de 60 ans sont dépendants et 1 personne de plus de 85 ans sur 5 (20%). L’âge moyen de perte d’autonomie est de 83 ans.

Si nos habitudes de prise en charge de la dépendance restent inchangées, ce sont 108 000 seniors qui seraient attendus en EHPAD d’ici 2030 et 211 000 entre 2030 et 2050. (1)

Ainsi, face aux chiffres de l’INSEE, nous pouvons légitimement nous poser la question de la place des EHPAD (Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes) dans la prise en charge des personnes dépendantes dans notre pays mais surtout le coût de prise en charge dans ces établissements à un moment où le pouvoir d’achat des Français est plus que jamais contraint du fait de la crise inflationniste.

Quelle est donc, en novembre 2023, l’offre EHPAD disponible en France métropolitaine ?

L’étude réalisée par Uni Santé permettra de dresser un bilan général de l’offre en EHPAD en France ainsi qu’une analyse précise du coût de ces établissements et donc du reste à charge que doivent supporter nos compatriotes.

Une offre en hausse mais surement insuffisante dans le futur

D’après l’étude réalisée par Uni Santé, la France compte à ce jour 597 421 lits disponibles répartis au sein de 7337 EHPAD. Si on rapporte ce chiffre aux données publiées par l’INSEE de 6,85 Millions de personnes de plus de 75 ans, cela correspond à un ratio de 8,70% soit 0,87 lits pour 10 personnes de plus de 75 ans.

A titre d’exemple, il y a un an, notre pays comptait, 596 763 lits disponibles pour 6,519 Millions de personnes de plus de 75 ans soit un ratio de 9,15%.

Ainsi, le premier constat que nous devons faire est le suivant : Bien que l’offre de lits semble augmenter dans le pays (hausse de 0,1% ; +658 lits), cette augmentation de l’offre ne permet pas de compenser l’évolution démographique qui ne fait que s’accentuer d’année en année.

Il y aurait donc ici un nécessaire sujet de planification à long terme afin d’éviter que le pays se retrouve en pénurie de lits disponibles en établissements d’accueil spécialisés notamment avec l’arrivée dans les années à venir de la génération dites du « baby-boom ».

Une offre inégale en fonction des régions

 L’offre de lits en EHPAD est également fortement inégale en fonction des départements. Ainsi, Paris ne compte que 4,07 places pour 100 personnes de plus de 75 ans alors que ce ratio peut monter jusqu’à 16,44 places pour 100 personnes dans le département de la Lozère.

De la même manière, dans les régions Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte-D’azur, le taux d’équipement ne dépasse pas les 8 lits pour 100 personnes de plus de 75 ans alors que les régions Bretagne et Pays de la Loire compte plus de 12 lits pour 100 personnes.

En regardant l’image de façon globale, on pourra réaliser un constat relativement simple : le taux d’équipement tend à être supérieur dans les départements à majorité rurale. Cette tendance s’expliquera notamment par la plus grande disponibilité du foncier dans ces départements venant faciliter la réalisation d’opérations immobilières.

Et encore majoritairement dominée par le secteur public

Les Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) peuvent être publics, privés commerciaux ou associatifs.

Sur les 7 337 EHPAD que compte notre pays en 2023, 44,43 % sont des structures publiques (soit 3258 EHPAD), contre 31,64 % pour les structures associatives (pour 2320 EHPAD) et 23,93 % pour les structures privés (avec 1759 établissements).

De plus, on pourra constater que les EHPAD publics sont très largement représentés dans les départements ruraux alors que les EHPAD privés commerciaux seront quant à eux surreprésentés dans les départements fortement urbanisés tels que Paris, les Bouches-du-Rhône ou encore les Alpes-Maritimes dans lesquels le coût du foncier pourra également être discriminants pour les établissements publics ou associatifs.

81 places en moyenne

Enfin, il nous faudra noter que la capacité moyenne d’hébergement des établissements est de 81 places avec néanmoins des variations en fonction du statut des établissements : Ainsi, les établissements publics compteront en moyenne 88 places, contre 76 places pour les établissements privés commerciaux et 75 places dans l’associatif.

Quel est, aujourd’hui, le coût de l’hébergement en EHPAD en France ?

La tarification dans les EHPAD repose sur les trois composantes de la prise en charge des personnes âgées :

–    le soin (pris en charge par l’Assurance maladie),
–    la dépendance (partiellement prise en charge par les départements à travers l’allocation personnalisée d’autonomie et par les résidents qui acquittent un ticket modérateur (Gir 5/6)
–    l’hébergement (à la charge du résident, de ses obligés alimentaires ou du département avec l’aide sociale à l’hébergement).

Un coût moyen d’hébergement mensuel de 2 319 € au 31 août 2023

D’après l’étude Uni Santé menée auprès des 7 337 EHPAD de France Métropolitaine, le tarif journalier soit l’hébergement + le tarif Gir 5/6 est de 77,29€ au 31 août 2023 soit un tarif mensuel de 2319€.

Par rapport à 2022, on pourra observer une hausse de 96 € soit 4,3%.

Bien entendu, il s’agit ici d’une moyenne nationale qui pourra grandement différer en fonction du statut des établissements mais également de leur localisation.

Ainsi, en fonction des statuts, nous observerons les chiffres suivants :

Il y a donc, à ce jour un différentiel moyen proche de 1000€ par mois entre les établissements publics et les établissements publics et les établissements privés commerciaux.

Avec une forte variabilité entre les départements

Comme chaque année, nous pouvons observer une forte variabilité des coûts de l’hébergement en EHPAD en fonction des départements.

 

 

C’est ainsi une variation allant de plus du simple au double que l’on observe entre les départements au 31 août 2023. Ainsi, le coût mensuel moyen sera de 1 875 € dans le Cantal à 4 031 euros à Paris. On soulignera également que 8 autres départements proposent un tarif mensuel moyen inférieur à 2 000 euros alors 2 autres départements (Les Hauts de Seine et les Yvelines) voient le coût de l’hébergement en EHPAD dépasser les trois milles euros.

Globalement, en regardant la carte ci-dessus on constatera assez facilement que les départements présentant les tarifs les plus faibles sont les départements ruraux (où les départements de la fameuse « diagonale du vide ») alors que les tarifs les plus élevés seront rencontrés dans les régions fortement urbanisées d’Ile de France ou du pourtour méditerranéen.

Cette différence tarifaire s’expliquera notamment par un coût du foncier bien moins élevés dans les régions rurales mais également par une surreprésentation des établissements privés commerciaux pratiquant des tarifs plus élevés dans les régions urbanisées et/ou méditerranéennes.

La nécessaire question du reste à charge

Au-delà de la question des tarifs département par département ou entre public, privé commercial et associatif ; la question centrale que nous devons peser est la question du reste à charge.

Le reste à charge s’entendra ici comme la somme dont le résident devra s’acquitter pour son hébergement en EHPAD une fois que l’on aura déduit sa retraite ainsi que les aides financières disponibles. Formuler autrement, cela reviendra à poser la question suivante : Les ressources mensuelles disponibles ou « ressources courantes » du résident sont-elles suffisantes à couvrir le coût lié à l’hébergement en EHPAD ?

Dans son rapport de juillet 2022 (1), la DRESS montrait ainsi que pour 61% des cas (et cela une fois que l’on avait décompter les bénéficiaires de l’Aide Sociale à l’Hébergement) cela n’était pas le cas. La DRESS montrait également dans son rapport qu’en moyenne, les personnes âgées perçoivent des aides à hauteur de 428 euros par mois soit 338€ d’Allocation Personnalisée d’Autonomie, 44€ d’aide au logement ainsi que 46€ de réduction d’impôt.

Nous retiendrons également une autre étude importante de la DRESS dans le cadre de notre analyse du reste à charge. En effet, entre 2016 et 2021 la DRESS a mené une large étude permettant d’estimer le niveau de retraite moyen département par département. Bien évidemment, les données commencent à dater et il nous faudrait procéder à une revalorisation au cas par cas afin d’estimer le reste à charge réel après ressources courantes.

Toutefois, la DRESS a estimé le niveau moyen de retraite (tout régime confondus) à 1531 euros brut par mois soit 1 420€ net.

Compte tenu des 428 euros d’aides perçues en moyenne par les résidents en EHPAD, on peut alors estimer à l’échelle nationale un reste à charge réel moyen après ressources courantes de l’ordre de 519€ par mois au 31 août 2023 ce qui semble cohérent avec les indications de la DRESS.

Attention, on notera qu’il s’agit bien d’une approche globale et moyenne. Le calcul du reste à charge réel de chacun dépendant naturellement de ses ressources courantes réelles ainsi que du lieu d’hébergement.

Conclusion

L’analyse des données au 31 aout 2023 tirées des bases Uni Santé nous permet aujourd’hui d’observer différents éléments :

  • L’offre EHPAD, bien qu’importante avec plus de 597 000 lits, est insuffisante dans certains départements. De plus, il apparait aujourd’hui que malgré l’augmentation du nombre de lits sur notre territoire, celle-ci ne permet pas de compenser l’évolution démographique de notre pays. C’est notamment le sens des propos de Pierre Moscovici, Président de la Cour des Comptes ndlr, qui a annoncé en septembre 2022 lors des Assises Nationale des EHPAD qu’afin de répondre efficacement à l’évolution démographique du pays (avec de plus en plus de personnes âgées), il nous faudrait doubler le nombre de lits en EHPAD. Cependant, bien que réel, ce constat se heurte à la réglementation régissant les ouvertures de lits qui ne permet pas à ce jour d’augmenter sensiblement les places disponibles mais également à la politique du gouvernement qui tend vers le domicile.
  • Au 31 août 2023, il a été constaté un coût moyen d’hébergement mensuel de 2 319 €, soit une augmentation moyenne de 4,3 % à 96 € par mois. Cette augmentation des tarifs semble aujourd’hui fortement impactée par le contexte inflationniste connu par le pays.Le tarif moyen de prise en charge pose une nouvelle fois la question du financement alors que la mise en place d’une véritable loi « Grand Age » devant permettre le financement à long terme de la perte d’autonomie a été remplacé par une « petite loi » ne permettant pas la mise en place des ajustements structurels nécessaires.

    De plus en analysant le reste à charge moyen que nous estimons au-delà de 500€ par mois, nous comprenons aisément pourquoi la DRESS estime que plus de 6 résidents sur 10 n’arrive pas à financer seul leur prise en charge en EHPAD ; Les principales options pour financer ce reste à charge deviennent alors la mobilisation de l’épargne ou du patrimoine ou le financement par la famille ou des proches montrant une nouvelle fois la nécessité de travailler à un financement durable de la perte d’autonomie dans notre pays.

 (1) Aides à l’autonomie des personnes âgées : qui paie quoi ? L’apport du modèle Autonomix – Résultats 2019 – Etude DRESS juillet 2022

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